Jim Husky chez le Pépère : récréation

Par Philippe Desmond.

La dernière magnifique chronique de Dom Imonk relatait une création, celle-ci parlera elle d’une récréation. Car tel était le cas hier soir chez le Pépère en cette nuit bordelaise encore trop pluvieuse.

trio

Récréation avec cette animation propre à ce genre de moment, les gens qui bougent, qui discutent, rient, se désaltèrent et grignotent leur petit goûter fait de tapas et autres cochonnailles, spécialités du lieu. Et lors d’une récréation on joue, ici pas au ballon ou à la corde à sauter mais de la musique, du jazz. Récréation car tout se passe dans la bonne humeur, spectateurs et musiciens se mêlent, s’invectivent gentiment aux aimables provocations de Stéphane Borde dont la stature remise son banjo au rang de ukulélé.

Le set commence en trio avec Stéphane donc, Nicolas Dubouchet et sa légendaire casquette à la contrebasse, et en vedette Jim Husky au piano et au chant ce soir, mais aussi capable de se produire au trombone ou encore à la trompette. Musicien complet et talentueux que cet Américain qui vit depuis longtemps à la campagne en Gironde. Chaque deuxième jeudi du mois il a carte blanche ici. Avec son look très bonhomme, barbichette et feutre zaninesque vissé sur la tête, il va promener ses doigts pour notre plus grand plaisir sur ce piano presque bastringue au gré de standards inusables. Je ne l’avais jamais vu jouer et je découvre un excellent pianiste caractéristique de ce style des années 30 assorti d’un très bon chanteur et tout cela avec un réel humour ; ses transitions, étoffées des interventions douces et légères de Stéphane Borde, sont très amusantes et en plus instructives.

De Louis Armstrong à Fats Waller en passant par des traditionnels comme « On the Sunny Side of the Street » ou le tube d’Irvin Berlin « Cheek to Cheek » le trio, très marqué par le son du banjo, va se mettre une assistance conquise encore plus dans la poche. C’est gai, ça joue bien, un pain par ci par là pris avec humour, ça vit. Le lieu lui-même est vivant, en haut, en bas du monde et de la bonne humeur, des clients au patron, ça compte.

Après la pause, une récréation dans la récréation, et comme dans une cour d’école on reforme les équipes, place au bœuf – dans ce lieu dédié au cochon je préfère ce terme à jam – avec les quelques musiciens qui sont là depuis un bon moment mêlés aux amis du public. Jean-Luc Pareau (Jazz Chamber Orchestra) au sax alto, George au ténor, Mathieu Tarot trompettiste récemment arrivé à Bordeaux, Jean Giraudeau au cornet (un vintage King Master 1946 pour les connaisseurs ; merci Jean) vont venir se mêler aux autres et la bagarre de récré va commencer.

jam
Compliment osé, mais compliment quand même, de la part de ma voisine « ça me fait penser à la scène de jazz endiablée des Aristochats » ; et bien oui, d’ailleurs la troupe enchaîne sur « The Bare Necessities  » si vous connaissez « Il en faut peu pour être heureux » dans le Livre de la Jungle  ! Je confirme.
Une fille va même oser rejoindre ces garçons turbulents, Blandine (de Blandine et l’Herbe à Swing) pour deux titres dont « I Can’t Give You Anything But Love », un plaisir.

blandine

Encore une jolie soirée en ce jeudi où il y avait l’embarras du choix, au Tunnel avec une troupe de choc autour de Roger Biwandu, au Siman avec du jazz aux sonorités brésiliennes, au Caillou avec Ceïba et ses chants du monde ou aux « jeudis du jazz » de Créon avec Zum Trio ! La musique c’est en live que ça se passe, pas à la télé ou en MP3 !

La pluie fait toujours des claquettes dehors mais finalement quelle importance ?

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